Mardi, 1 mars, 2022

Me Fabienne GIMONDI, Avocat à Montpellier, intervient notamment en matière de

divorce et prestation compensatoire

succession et partages amiables ou judiciaires

liquidation des régimes matrimoniaux

indivision

Un homme fait, sur une période de 13 ans, plusieurs versement sur un contrat d'assurance-vie. Il demande le rachat et replace la somme (160 000 €) sur un autre support d'assurance-vie. Son épouse est désignée bénéficiaire au détriment de sa fille née d'un précédent mariage.

Il décède et sa fille demande la réintégration des primes dans la succession de son père, vu l'article L 132-13 du code des assurances.

La Cour de cassation, le 9.02.2022 (CIV 1, N° de pourvoi:20-18544 Publié au bulletin) répond : 

"6. L'article L. 132-13 du code des assurances dispose : « Le capital ou la rente payables au décès du contractant à un bénéficiaire déterminé ne sont soumis ni aux règles du rapport à succession, ni à celles de la réduction pour atteinte à la réserve des héritiers du contractant. Ces règles ne s'appliquent pas non plus aux sommes versées par le contractant à titre de primes, à moins que celles-ci n'aient été manifestement exagérées eu égard à ses facultés. »

7. Ce texte ne s'applique pas aux primes versées sur un contrat d'assurance sur la vie racheté par son souscripteur.

8. Ayant souverainement estimé que le versement de la somme de 160 000 euros le 14 février 2006 sur le contrat d'assurance sur la vie Top croissance ne présentait pas un caractère manifestement exagéré eu égard à l'âge du souscripteur, à sa situation patrimoniale et familiale et à l'utilité que revêtait pour lui l'opération, la cour d'appel, qui a exactement retenu qu'elle n'avait pas à vérifier si les primes versées sur le contrat Projectis, racheté le 8 février précédent, présentaient un caractère manifestement exagéré, a légalement justifié sa décision."

Pour la Cour de cassation, dès lors que le contrat d'assurance vie a été racheté pour redevenir un capital, il n'y a pas lieu de vérifier si les primes versées sur ce contrat d'assurance avaient été manifestement exagérées. Le rachat rend inopérante la recherche concernant des primes versées sur un contrat d'assurance vie clôturé.

Quand ce capital est réinvesti immédiatement sur un autre contrat d'assurance vie, la Cour de cassation indique qu'il relève de l'appréciation souveraine des juges du fond de rechercher s'il n'y a pas eu versement "d'une" prime manifestement exagérée. En l'espèce, elle considère que la Cour d'appel a bien fait la vérification en considérant que ce n'était pas le cas, et elle rejette le pourvoi.

Cela étant, on peut se demander si, dès lors que la prime unique (160 000 €) provient du rachat d'un autre contrat d'assurance vie immédiatement réinvesti, les juges ne considèreront pas "de facto" que le versement unique est (nécessairement ?) non exagéré eu à égard à l'âge (83 ans, en l'espèce), à la situation familiale (pas de loyer, pas de charges particulière, plus de 84 689,10 € sur ses comptes) et à l'utilité du contrat pour le contractant décédé (nombre d'années de mariage). En effet, plutôt que de procéder au rachat, il aurait pu tout autant changer la clause bénéficiaire (mais alors ce sont les primes versées initialement qui auraient été soumises à examen du juge).

Cela a pu influencer le raisonnement des magistrats.

Cela rend la décision critiquable car la somme de 160 000 €  correspondait à 65 % de tous ses avoirs,et le souscripteur, ayant 83 ans et une santé chancellante au jour de l'ouverture du nouveau contrat d'assurance vie, l'utilité de ce contrat basé sur un aléa était minime, si ce n'est le montant de la prime exagéré au regard de son patrimoine.

Le fait que l'épouse bénéficiaire ait pu se constituer un patrimoine de 3 immeubles, durant le mariage était sans effet pour apprécier le caractère manifestement exagéré ou pas de la prime.

F.GIMONDI

AVOCAT A MONTPELLIER

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